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MADAGASCAR (RN7) - Ilakaka, ses mines de saphirs
> Ilakaka - la gare routière un matin d’aout.
On ne foule pas le sol d’Ilakaka par hasard. Certes, les malgaches sont arrivés massivement dans cette ville en 1998, année de la découverte du plus grand gisement de saphir au monde. Mais lorsqu’on est vazaha, à moins d’etre un Bob Denard, c’est un coin mal choisi pour le Farniente.
Les guides vous ont prévenu et les policiers bien armés en poste à chaque bout de la ville derrière des barbelés coupants vous le rappellent : ici, le meurtre est monnaie courante.
Ilakaka se donne des airs de Mont Saint-Michel, avec son artère principale fourmillant d’acheteurs et de commerçants ambulants spécialisés dans la vente d’objets faussement futiles : loupes, lampes torches en aluminium quand ce n’est pas un lot de pierres probablement refusées par les intermédiaires locaux.
> Ilakaka - mythe et réalité au royaume des saphirs.
Pourtant, le lieu n’est pas en odeur de sainteté. Derrière un décor hollywoodien-carton-pâte-précaire alignant les baraques-planches dans une poussière crasse sèche, derrière les enseignes aux couleurs vives qui vénèrent le dieu Saphir, se cache difficilement la misère aigue d’une population d’ex-agriculteurs, ex-commerçants, ex-concessionnaires-autos qui aujourd’hui ne sont plus que les acteurs affamés, les marionnettes abusées d’une vilaine fièvre bleue qui se voulait ‘ferveur’.
- «Si t’as de la veine, c’est que tu dois être en principe à piocher à 7 ou 8 m de profondeur dans les 30 kms² hébergeant le filon. Tu t’es delesté au préalable de tes derniers ‘ronds’ pour acheter une carte de travail au Felapaiso, organisme qui gère le site, et maintenant tu mises sur ton courage et ta résistance pour tenir bon jusqu’à ce que le Dieu Saphir fasse de toi un élu.
Si t’es moins chanceux, c’est que la galerie mal étayée dans laquelle tu te trouves t’a probablement enseveli : ironie de l’histoire, tu as creusé ta propre tombe et on fera peu de cas de ta disparition. Dis-toi bien que le choléra aurait aussi pu se charger de ton funeste destin.
Si tu fais partie des lucky guys, sache quand même que les intermédiaires qui te rachèteront tes pierres les revendront 100 fois plus chers aux négociants asiatiques : ici, le risque paie plus pour ceux qui ne les prennent pas et les droits d’exploitation de cette Terre Sainte sont aux mains des sociétés étrangères. Mais tu auras au moins la satisfaction de venir te dépouiller la tête dans un de ces saloons de fortune, où des créatures bavardes marchandent pêle-mêle leurs appas.»
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